Mémoire de thèse professionnelle réalisé par Sabine Corcos, étudiante en Mastère Spécialisé Politiques et actions publiques pour le développement durable (PAPDD), avec la collaboration du pôle Réseaux de Chaleur du CETE de l’Ouest – juin 2013.
Résumé
Les réseaux de chaleur et de froid consistent à centraliser la production de chaleur ou de froid pour desservir plusieurs usagers. Ils présentent généralement des avantages par rapport aux solutions décentralisées en matière de diminution des émissions de gaz à effet de serre mais aussi en termes de fiabilité et de sécurité. Les situations des réseaux de chaleur dans le monde sont très constrastées et dépendent fortement des politiques énergétiques menées dans les différents pays. Nous avons réalisé une étude comparative de leur situation en France et aux Etats-Unis.
Alors même que le chauffage urbain moderne est né aux Etats-Unis, les réseaux de chaleur ne couvrent aujourd’hui que 4% des besoins de chauffage. Ils ont été conçus par les Electric Utilities américaines à la fin du XIXème comme des moyens d’utiliser la chaleur fatale perdue lors de la production d’électricité. En France, où les 450 réseaux distribuent 6% de la chaleur consommée, ils ont accompagné les politiques d’urbanisation des années 60 et sont en majorité issus d’initiatives de collectivités locales. Alors que le secteur résidentiel constitue la majorité des clients des réseaux en France, c’est le secteur commercial ainsi que les campus universitaires qui sont majoritaires aux Etats-Unis.
La France a fixé des objectifs clairs en matière de politique énergie-climat contrairement aux Etats-Unis. Les lois Grenelle en France promeuvent directement les réseaux de chaleur conçus comme des outils de mobilisation massive des énergies renouvelables et de récupération. Le fonds chaleur, l’obligation d’étudier la faisabilité d’un réseau alimenté par des énergies renouvelables ou de récupération pour tout projet d’aménagement, la révision de la procédure de classement sont des mesures phares des lois Grenelle. Aux Etats-Unis, certaines politiques fédérales ou étatiques peuvent soutenir indirectement les réseaux via le soutien de la cogénération, à laquelle ils sont très souvent associés. Au niveau des Etats, on peut citer les Clean Energy Funds, Renewable and Alternative Portfolio Standars, Energy Efficient Ressource Standards.
Dans les deux pays, on note un renforcement du rôle des acteurs locaux à travers les outils de planification urbaine qui sont les plus adaptés pour permettre le déploiement des réseaux. De plus, la réglementation au niveau de la certification des bâtiments tend à évoluer en faveur des réseaux. Alors que les initiatives publiques sont majoritaires en France, aux Etats-Unis, la propriété et la responsabilité incombent plus largement aux entreprises privées. Cependant, un nombre croissant de villes, seules à avoir une vision de long terme, sont impliquées dans les nouveaux projets de réseaux fortement capitalistiques.
Quel avenir pour les réseaux de chaleur ? Des innovations visant à optimiser les paramètres des réseaux se développent. Le stockage d’énergie thermique, tout comme les réseaux basses températures par exemple, permettent de maximiser l’utilisation d’énergie renouvelable ou de récupération. Ces innovations sont clefs pour faire des réseaux des outils indispensables à la lutte contre l’effet de serre dans les deux pays. Aux Etats-Unis, il semble que la conscience des avantages sociétaux des réseaux se renforce. L’International District Energy Association milite pour obtenir davantage de politiques de soutien fédérales pour les réseaux de chaleur en mettant en avant la capacité des réseaux à mobiliser massivement les énergies renouvelables et de récupération, se rapprochant ainsi de la logique franco-européenne.